ESt-ce que je retournerai avec plaisir au bureau ?

La culture « bureaucratique » s’est développée  autour de quelques concepts : une grande quantité d’informations à analyser, des données à traiter de manière efficace, des bureaux symboles de puissance,  une culture managériale du contrôle…

Toutefois,  ces concepts sont battus en brèche depuis une vingtaine d’années :

l’organisation pyramidale (tous autour du chef) fait place à des plateaux de travail plus déstructurées, des espaces de rencontre et de partage, de nombreux collaborateurs, de tous niveaux, travaillent à l’échelon international, avec des services supports basés en Inde ou en Irlande, les outils modernes ont déstructuré la notion de temps et de lieu : il n’est plus important d’être à son bureau pour lire ses mails ou consulter des documents, de moins en  moins de postes nécessitent une présence humaine permanente….

Le vieux concept bureaucratique : « Le bureau est le lieu où le travail se fait » cède progressivement le pas à celui-ci : « l’important est le travail à faire, pas le bureau. Cette tâche peut être au sein de différents espaces de travail variant selon  les besoins ».

Dans ce contexte, dès les années 1990, certains imaginaient la fin des bureaux, voire plus simplement un très grand assouplissement des règles au profit du télétravail, des bureaux partagés…

Si cela était alors « techniquement » possible,  d’importances résistances culturelles se firent jour. Le bureau n’est pas seulement un lieu de « production ».  il est aussi un symbole fort de l’identité d’une entreprise, un lieu social de partage et d’échange et un outil de travail.

De nombreuses entreprises ont déjà fait ce constat et ont aménagé (à l’occasion d’un déménagement) ou réaménagé (sur le même site) leurs locaux pour faciliter la collaboration, le partage, la socialisation,… Ces locaux ont aussi pour but de favoriser l’implication des collaborateurs, critère important pour les Générations Y.

La limite est que la majorité des décideurs sont des papy boomers ou des Génération X et qu’ils sont prêts à investir dans de telles approches, ils mésestiment parfois le besoin de sensibiliser, d’impliquer et d’éduquer les collaborateurs à l’utilisation de ces espaces.

Ne risque-t-on pas aujourd’hui de recréer les  conditions pour les problèmes d’ici quelques années, à savoir le bruit, la « guerre de territoires »  et la promiscuité ?

Aux USA, BOSTI   (www.bosti.com), une société spécialisée dans les recherches sur les espaces de travail, a souligné dans ses publications les deux besoins des salariés : capacité à se concentrer et faciliter à communiquer en face-à-face.

Or ces deux éléments sont souvent en opposition : plus de communications suppose plus d’échanges. Si ceux-là, dans l’absolu, devraient se produire dans les espaces prévus, c’est loin d’être le cas en permanence. Le bruit du téléphone (même si celui qui reçoit l’appel change d’endroit), les échanges ponctuels entre deux personnes, la circulation dans les passages, tout cela affecte la tranquillité des espaces dédiés à la concentration.

Tout le monde n’a pas le même besoin de silence pour se concentrer. Certains peuvent supporter un bruit de fond quand d’autres ont besoin d’un grand calme.  De même, selon les tâches, le degré de silence nécessaire n’est pas le même.

Comment réduire le bruit ? Les facteurs qui influencent le plus le niveau sonore sont les plaques absorbantes au plafond, la moquette au sol et la hauteur des cloisons phoniques de séparation.

L’enjeu financier à la fois pour les investisseurs immobiliers (tirer le prix de revient le plus bas pour maximiser le profit)  et pour les financiers des entreprises (réduire les coûts pour alléger les charges) conduisent souvent une moindre qualité de la construction et des matériaux utilisés.  A court terme, les dirigeants d’entreprise sont plus facilement « jugés » sur l’augmentation de la marge créé par la baisse des charges locatives.

Toutefois dans les études terrain, la notion de bruit ressort largement en tête des préoccupations des collaborateurs.  Elle est même plus pour les managers que pour les collaborateurs. Les cadres supérieurs avaient plus l’habitude de travailler dans des bureaux clos et ont du mal à s’habituer à la vie en grands espaces.

D’autres, parmi les collaborateurs utilisent de plus en plus de casques qui les protège du bruit externe (les casques servent pour le téléphone).

Alors, vive la sociabilité ou mort au bruit ?  Vive le retour au bureau ou mort au bureu ?

Source : Gérard Rodach, Adieu Bureau, ESF 2014