Managez-vous (ou êtes-vous managé) à la Papou ?

Les leçons à tirer du management en Papaousie. Un changement à nul autre pareil.

En Papouasie Nouvelle Guinée, il est courant de voir des exploitations… sous-exploitées. Certains agriculteurs ne cultivent que 50% de leurs terres sans qu’il y ait des raisons économiques ou financières apparentes. Les autorités en concluent que les gens sont paresseux et irrationnels.

Pourtant, lorsque vous interrogez les propriétaires des terres, ils vous expliquent que s’ils produisent de trop, leurs voisins leur jetteront des sorts. Leur comportement est donc rationnel si vous prenez en compte les phénomènes de groupe.

Ce phénomène de groupe peut aussi expliquer la démesure des cadeaux offerts aux chefs. Ceux-ci croulent sous les cadeaux tant en animaux qu’en espèces. Ils entretiennent, à la manière des parrains de la mafia, une relation de dépendance avec leurs subordonnées en leur imposant des dons que ceux-ci ne peuvent fournir avec leurs seuls moyens. Il en résulte un endettement et une spirale qui asservit les membres de la tribu. Les grands chefs ne font rien de particulier avec leurs cadeaux si ce n’est s’assurer de la bonne volonté de leurs vassaux. Ces derniers, sachant que toute amélioration de leur situation se traduirait par de nouvelles exigences de leur chef coutumier, ne sont guère inciter à dépasser le niveau minimal de production.

Au final, ce comportement totalement irrationnel à nos yeux d’occidentaux est parfaitement rationnel lorsque vous le replacez dans leur contexte social.

« Pauvres Papous » allez-vous vous dire. Pourtant, n’avez-vous jamais croisé des équipes de collaborateurs qui font en sorte que personne ne dépasse un certain rythme de travail (de peur peut-être que les exigences augmentent) ? Avez-vous déjà rencontré des managers qui mettent leurs équipes en situation de dépendance (informations, autorisations, moyens…) pour mieux les tenir ? En bref, sommes-nous si différents des chefs papous ?

Les outils de management sont souvent présentés d’une manière rationnelle et cartésienne. Nos comportements (tant comme manager que comme collaborateur) relèvent d’autres formes de logique, ce qui explique parfois des incompréhensions.

La communauté des Papous survit bien dans cette logique jusqu’au moment où des contraintes externes (pression gouvernementale, mauvaises récoltes, …) peuvent faire monter la pression. Le mode de régulation peut être alors décontenançant : le chef peut réguler la pression en utilisant ses biens, quat aux membres de la tribu, être un peu plus ou moins endetté n’a guère d’importance.

Et vous, avec vos managers et vos collaborateurs, comment cela se passe-t-il, notamment en phase de conflit ?

Inspiré d’un article du Financial Times (Keir Martin, 250809)