Transmettre challenge N° 35 Le vrai besoin

L’auteur, un spécialiste de la reconnaissance vocale, développe dans ce livre la place que prend et va prendre l’Intelligence Artificielle. Cela a aussi ses limites comme en témoigne cette histoire qui prend un goût particulier en ce moment de confinement. 

Un Taïwanais avait déjà fondé puis revendu plusieurs entreprises florissantes dans le domaine de la technologie grand public , mais, avec l’âge, il souhaitait s’investir dans un projet qui ait davantage de sens. Il voulait à présent s’adresser à des pans de la population que les start-up avaient souvent négligé. Il avait donc décidé de concevoir un produit pour faciliter la vie des personnes âgées. Mais sa toute dernière invention lui posait un problème.

Elle consistait en un large écran tactile fixé sur un support qu’on plaçait, par exemple, à côté d’un lit. L’écran affichait quelques applications simples et pratiques correspondant à des services courants : se faire livrer des repas, regarder son feuilleton préféré la télé, appeler son médecin, etc. Les personnes âgées ont souvent du mal à s’y retrouver dans les méandres d’internet ou à manipuler les petites touches smartphones.

Aussi mon ami s’était-il efforcé de tout simplifier au maximum. Les applis s’ouvraient en un ou 2 clics et, en cas de problèmes dans l’utilisation du dispositif, un bouton vous permettait d’appeler directement un service d’assistance.  L’idée paraissait fantastique et, à notre époque, promise à un grand succès. Beaucoup d’adultes, en Chine comme ailleurs, sont trop accaparés par leur travail pour pouvoir prendre soin de leurs parents vieillissants, comme le voudrait la forte tradition de piété filiale. Dans ce contexte, l’écran tactile était une solution intéressante.

Malheureusement, après la mise en place d’une version d’essai ,un problème s’est présenté : de toutes les fonctions disponibles, la plus utilisée, et de loin, n’était pas la livraison de repas, la commande de la télé, ni même la consultation médicale. C’était le bouton du service d’assistance, rapidement saturé d’appels.

Que se passait-il ? les usagers étaient-il incapables de suivre seule la procédure, malgré la simplicité du système ? Pas du tout.  Après une petite enquête, il a découvert que les personnes âgées appelaient tout simplement parce qu’elles se sentaient seules et avaient envie de parler à quelqu’un. La plupart d’entre elles avaient des enfants qui veillaient à ce que tous leurs besoins matériels soient pourvus. Mais cela ne remplaçait pas le vrai contact humain, quelqu’un avec qui échanger.

Que faites-vous pour garder le lien avec vos collègues ?