Avez-vous le « bon » esprit d’équipe ?

Qui n’a jamais entendu dire « nous sommes une équipe et nous devons gagner ! ». D’autres entreprises glorifient le team spirit. Les formations sur le management et le leadership accueillent souvent d’anciens entraîneurs ou sportifs qui viennent révéler les secrets de leurs succès. En bref, depuis le mode projet jusqu’aux commerciaux, les couloirs des entreprises résonnent d’un même esprit : «ayez l’esprit d’équipe ! Comme dans le sport, forgeons-nous un moral de vainqueur ! ». De quel sport parlons-nous en fait ?

Michael Gillepsie de l’université de Duke (USA) vient de publier un essai sur l’impact du sport dans l’esprit américain. Il distingue quatre grandes périodes de référence :

En Grèce antique, le sport était individuel et aristocratique. Réservé aux citoyens libres, il avait pour fonction de développer le courage et l’endurance. En somme, seuls quelques élus pouvaient y parvenir. Cela me fait penser à la culture médiatique du leadership où nous avons l’impression qu’un homme seul a pu redresser (ou faire sombrer) une entreprise, un parti politique, un pays.

Dans la Rome ancienne, ces mêmes hommes libres ne s’abaissaient pas à combattre dans l’arène. L’esprit sportif convenait pour des esclaves qui s’entretuaient dans des spectacles organisés par les puissants (gouvernements ou riches citoyens). Cet esprit sportif ressemble au sponsoring où de loin vous pouvez assister à des exploits sportifs réalisés par un ou plusieurs hommes portant vos couleurs.

Vint la tradition britannique du XIXème siècle, où les écoles utilisèrent le sport pour former une classe dirigeante endurcie. Les vertus professées étaient l’esprit d’équipe et le fair-play. Toute faute personnelle pouvant pénaliser l’équipe, chacun devait faire preuve de loyauté, d’honneur et de respect des règles…au sein de l’équipe. Par contre, lors d’un match, l’important est la victoire. En France, les services (unités composées de personnes faisant le même métier : le technique face au marketing par exemple) ou les personnes issues des mêmes écoles (les X contre les Centraliens) jouent bien ce jeu.

Enfin, les Nord-Américains apportèrent une quatrième dimension qui fusionne les trois premières : ils favorisent le sport individuel ou d’équipe…par délégation. Dans les collèges et universités, la course aux victoires est telle qu’il s’agit d’une élite recrutée ad hoc, et en même temps supportée par l’ensemble du personne de ce même univers. Les compétitions se déroulent devant des partisans colorés (aux couleurs de leur équipe) des deux bords. Cette dernière approche mixe les avantages et inconvénients de toutes ces dimensions. C’est ce que souhaiterait faire nombre d’actions autour des valeurs partagées : faire communier les gens ensemble. Cela suppose que l’esprit et la lettre se rejoignent, à savoir que les actes de la direction de l’entreprise soient en ligne avec ses propos. Cela arrive parfois.

Alors, lorsque quelqu’un vous suggérera d’avoir l’esprit d’équipe, demandez-lui de quelle forme d’esprit il parle.