La curiosité est-elle un vilain défaut ?

Dans son livre « Du côté de Castle Rock », Alice Munro (Canadienne, prix Nobel de littérature 2013) raconte les pérégrinations de sa famille venue au XIXème siècle de l’Ecosse au canada et son enfance à la campagne. Aujourd’hui, mariée à un géographe, elle s’intéresse à l’histoire de son environnement, ce qui les conduit (elle et son époux) à interroger des habitants d’un endroit donné pour comprendre telle ou telle situation.

Elles n’ont pas l’air de trouver bizarre que des gens souhaitent s’instruire au sujet de choses qui ne leur seront d’aucun bénéfice particulier et n’ont pour eux aucune importance pratique. Elles ne laissent pas entendre qu’on leur fait perdre du temps parce qu’elles ont d’autres préoccupations. C’est-à-dire des préoccupations réelles. Un travail réel.
Pendant mon adolescence, l’appétit pour des connaissances dénuées de caractère pratique quelles qu’elles soient n’était pas encouragé […] Il était nécessaire d’apprendre à lire mais pas le moins du monde désirable de finir le nez dans un bouquin. S’il fallait bien apprendre l’histoire et les langues étrangères pour sortir diplômé de l’école, il était tout naturel d’oublier ce genre de choses le plus vite possible. Autrement on se faisait remarquer (en italiques dans le texte). Et ce n’était pas une bonne idée.

Ce texte m’interpelle sur trois niveaux :

Le premier est à titre personnel : sommes-nous, chacun d’entre nous, curieux et avons-nous des sujets de curiosité hors de toutes préoccupations familiales ou professionnelles ? En bref, nous accordons-nous le droit à vagabonder librement par moments ?
Le deuxième est à titre social : comment notre famille (au sens large) et/ ou nos amis, relations… voient-ils cette curiosité ? Nous envient-ils ou nous disent-ils (directement ou non) : « il ferait mieux de… ». Est-ce que cela a évolué dans le temps ?
Le troisième niveau est à titre professionnel : vous accorde-t-on le droit de vagabonder (à l’instar de Google qui encourage ses salariés, pour 10 à 20% de leur temps, à faire leur propres recherches) ou bien est-ce la loi du rendement à court terme ?
Si, globalement, j’observe que les choses ont bien évolué sur les plans personnel et social, je note une régression sur le plan professionnel avec des contraintes de temps et de charges de travail de plus en plus fortes. Résultat : le travail est fait de manière mécanique (et sans valeur ajoutée) et l’implication diminue.

Avons-nous fait le meilleur choix ?