Slow reading : dites-moi comment lisez …

Dans un monde où tout va très vite, il est devenu de plus en plus commun de lire vite, très vite, voire plus du tout. Il y a plein de bonnes raisons pour cela. Mais est-ce « sain » ? Qu’y gagnez-vous à lire vite ? Qu’y gagnez-vous à faire du « slow reading » ?

Un petit retour en arrière : rappelez-vous l’école primaire : les lecteurs lents étaient perçus comme de mauvais élèves. Jamais de félicitations ou d’encouragements, mais plutôt une image d’esprit lent. Pourtant cela n’a pas toujours été le cas : le philosophe allemand Friedrich Nietzsche se qualifiait lui-même en 1887 de professeur de « lecture lente » ; il est vrai que cela s’appliquait à la philologie, l’étude des textes et des documents.

Le temps a bien changé depuis : le déluge d’informations que nous connaissons, l’impact des outils technologiques, la place prise par la voix et l’image au travers des mobiles et des ordinateurs, les modes de management qui se veulent toujours plus réactifs nous poussent à parcourir plus qu’à lire. Ne mettons pas tout sur le dos des employeurs. Cela commence bien avant l’entreprise : à titre d’exemple, aujourd’hui, seul un lycéen sur 30 lit un livre par mois en terminale littéraire.

Il y a plein de prétextes à cela : certains trouvent la lecture ennuyeuse, d’autres la qualifie de perte de temps, ou encore invoquent le manque de mémoire, la préférence pour l’image… Pourtant, l’expérience de la vie en société (vie privée ou professionnelle) nous fait toucher du doigt que lire vite augmente les risques de mécompréhension et de mémorisation, d’où un temps considérable consacré ensuite à retourner au texte, à relire, à échanger pour finalement se mettre d’accord.

Nous y retrouvons deux facteurs importants que j’ai évoqués dans mes derniers billets. D’abord, nous confondons vitesse et précipitation. Vouloir agir vite sans prendre le temps de la réflexion prend toujours plus de temps. Ensuite, nous ne faisons plus la part des choses entre ce qui est important et urgent. Vous pouvez lire en diagonale des données purement informatives, par contre donnez-vous le temps de lire des textes qui vous nourrissent, vous enrichissent.

Qu’est-ce que vous y gagnez ? D’une part un gain de temps…a-postériori, mais aussi et surtout un enrichissement personnel et une meilleure mémorisation. Cette montée du « slow reading » s’inscrit dans la tendance du mouvement née en Italie autour du « slow food ». Les adeptes de ce mouvement qui replacent le plaisir de prendre le temps de se restaurer comme moyen d’échange et de plaisir de vie n’en font pas une fin en soi : ils suggèrent de prendre de temps en temps le plaisir de savourer leur repas ou un bon livre.

C’est ce que je vous souhaite pour cet été : faites-vous plaisir, offrez-vous un livre qui vous fait plaisir et donnez-vous le temps de le lire. La vie ne vous paraitra que plus belle.