Négocier et coopérer, est-ce compatible ? (1/2)

Analyse du livre de Robert Axelrod : « Comment réussir dans un monde d’égoïstes ? » (Editions Odile Jacob, 2006) Nous agissons dans notre propre intérêt. Les motivations individuelles ne sont pas souvent altruistes. La générosité cache souvent une motivation individuelle. La charité est une manière de sauver son âme. Cependant l’attitude d’un égoïste ne mène pas forcément à une société où la règle est «chacun pour soi». L’homme a tendance à être égoïste, et pourtant la coopération existe. Comment peut-elle se développer?

Nous présentons aujourd’hui un résumé des grands thèmes de l’ouvrage. Mercredi, nous continuerons en publiant des commentaires autour de cette approche

Axelrod a observé (en 1984, date de la parution du livre) plusieurs cas de coopération : •Entre pays par exemple, pour réduire la course aux armements.


•C’est aussi le cas du cadre qui rend un service pour obtenir un retour d’ascenseur, ou d’une entreprise qui fixe un prix élevé, en espérant que le marché le suivra.

Pour étudier la viabilité de la coopération sous cette condition, Axelrod s’est posé 3 questions: •Comment une stratégie potentiellement coopérative peut-elle émerger dans un environnement composé principalement de non-coopérants ?

•Quel type de stratégie peut prospérer dans un environnement hétérogène et complexe avec une grande diversités de stratégies ?

•Comment une telle stratégie peut-elle résister à l’invasion d’une stratégie moins coopérative ?

Axelrod a découvert que la coopération peut évoluer en 3 phases:

  1. la coopération peut émerger même dans un monde ou tout le monde fait cavalier seul, à condition que les individus puissent se rencontrer. Des éléments de morale comme l’honnêteté, la générosité ou le civisme ne sont pas nécessaires s’il existe des intérêts personnels pouvant se développer grâce au phénomène de réciprocité
  2. La stratégie fondée sur la réciprocité peut prospérer dans un monde où il existe de nombreuses stratégies différentes
  3. Une fois établie la coopération peut résister contre d’autres stratégies moins coopératives.

Il souligne alors 4 comportements individuels pouvant favoriser la coopération:

•ne pas être jaloux de la réussite de l’autre

•ne pas être le premier à faire cavalier seul

•pratiquer la réciprocité dans tous les cas

•ne pas être trop malin

Puis Axelrod fait quelques suggestions pour créer un environnement favorable à la coopération:

•Augmenter l’ombre portée par l’avenir sur le présent: plus la conséquence de l’action prise maintenant aura des répercussions sur le futur, et plus la coopération sera efficace.

•Modifier les gains de façon à rendre la coopération plus bénéfique

•Enseigner les gens à se soucier les uns des autres

•Enseigner la réciprocité.

•Améliorer les capacités de reconnaissance (de la stratégie de l’autre, et savoir reconnaître la coopération et la réciprocité).

Une structure sociale est nécessaire à l’établissement de la coopération (il ne faut pas d’isolement).

Axelrod examine 4 facteurs intéressants pouvant engendrer des structures sociales:

•L’étiquette d’une personne (ensemble repérable de ses caractéristiques immuables, comme le sexe) aide à présupposer un comportement, et oriente donc notre choix initial de coopérer ou non. L’inconvénient est que cela entraîne des stéréotypes qui peuvent d’une part conduire à des erreurs, et d’autre part induire des comportements en conformité avec ces stéréotypes. En ce sens, les forts deviennent plus forts, et les faibles plus faibles, les hiérarchies peuvent ainsi se créer et se renforcer dans la durée.

•La réputation que l’on se crée sert de force de dissuasion, car elle rend la menace plus ou moins crédible.

•La réglementation se doit d’être suffisamment sévère pour être utile, mais pas trop pour éviter des conflits systématiques qui coûtent cher.

•Le principe de territorialité fait qu’on entraîne plus facilement son voisin à imiter un type de comportement, qu’un inconnu. En ce sens, un exemple percutant, même s’il n’est pas le meilleur, pourra entraîner une forte imitation chez les voisins.

L’auteur termine son étude en reprenant le principe de réciprocité, et en mesurant sa robustesse (sa capacité à résister à l’invasion d’autres stratégies). Il en conclue que ce principe est une ouverture vers un monde meilleur, appliquant une valeur commune, et stable car dans l’intérêt de tous.


Ce livre est particulièrement intéressant car il pose la question de la coopération, elle nous concerne tous, que ce soit dans nos vies privées, ou face aux organisations.