Faut-il vous payer au minimum ?

Toutes les études montrent que ce n’est pas le montant du salaire qui fait le bonheur (une fois passé le seuil de la sécurité). Alors pourquoi payer / être payé plus dans ce cas. Oui, mais en échange de quoi ?

Yves Morieux, du BCG, a publié cette semaine un point de vue dans les Echos (07/04/09) autour du sens des rémunérations : les salariés (y compris les top managers) se désinvestissent de manière croissante et ressente une insatisfaction croissante au travail. Cela n’est pas nouveau mais la crise actuelle avec ses gels de salaires et les stock-options de quelques uns ne fait que rajouter une bonne couche de raisons pour cela.

Les DRH en ont pris conscience depuis longtemps, d’où les salaires variables, les primes aux objectifs et à la performance, la notation individuelle… qui achètent non pas la fidélité présente (synonyme autrefois d’emploi à vie) mais l’engagement futur (travaille bien et …tu verras). Malheureusement, dans une conjoncture floue, molle et indécise, il n’y a pas grand-chose à partager. Bien plus, les oracles prédisent plutôt que ce sera une prime pour simplement garder son emploi. Un exemple ? Les restaurateurs ont bataillé des années pour avoir une TVA à 5,5% promettant en échange d’engager 10, 20, 50, 100, 150.000 personnes en plus. Maintenant qu’ils l’ont (depuis quelques semaines), ils expliquent que cela va tout juste leur permettre de garder le personnel actuel et encore…

Il y a aussi les discours sur la mission de l’entreprise et les valeurs partagées. Cela peut marcher si les dirigeants font ce qu’ils disent et disent ce qu’ils font. L’écart entre les valeurs proclamées et la vie pour le salarié ou le fournisseur est parfois si grand qu’il y a risque que ces derniers deviennent dubitatifs.

Comment alors engager des collaborateurs souvent déjà fort pressurés de toute part ? En revenant à deux basiques pas si lointain mais déjà oubliés :

– Réapprendre à travailler ensemble, à coopérer et à construire quelque chose de collectif. Tout le contraire des approches basées sur les approches individuelles. Pourquoi ? Les approches sur la motivation (cf les thèses de Claude Levy-Leboyer) nous apprennent que nous sommes motivés soit par les objectifs, soit par le travail bien fait, soit par le travail en équipe. Or les objectifs sont durs à fixer en ce moment, le travail bien fait (= à son idée) est plus souvent remplacé par le « vite fait au mieux ». Reste donc à réintroduire la dimension humaine du plaisir de l’effort partagé. – Un management de proximité libéré de ses contraintes de reporting (parfois 30% de son temps) et qui anime son équipe autour d’un projet collectif et partagé. Cela marche, j’en ai mis en place et les salariés retrouvent un goût à s’investir. Pourquoi n’est-ce pas plus répandu ? Parce que cela peut remettre en cause le pouvoir hiérarchique supérieur. Non pas parce que les personnes deviennent des révolutionnaires, mais tout simplement parce que pour de nombreux hiérarchiques, le pouvoir c’est le savoir et l’autorité de contrôle. or, dans cette situation, ils ont alors peur de paraître « has been » aux yeux de leurs collaborateurs.

Mon expérience de tous les jours en entreprise me montre que le courage managérial n’est pas nécessairement placé au meilleur niveau. Licencier 100 personnes demande du courage. Les remotiver en les aidant à s’autonomiser encore plus. Alors, en attendant, il faut continuer à payer plus.