Savez-vous vraiment poser des questions ?

Dès tout petit, nous questionnons : « pourquoi ceci ? pour quoi cela ? ». Plus grand nous continuons, mais notre registre de questions s’amenuise. Nos questions sont à 90% fermées, parce que plein de savoir et de certitudes, nous ne cherchons qu’à vérifier ce que nous pensons ou croyons. 

Voici un conte Haïtien qui vous illustre cela.

« Nèg save, un homme au grand savoir, parcourait le pays, offrant trois sacs d’argent à celui qui lui poserait des énigmes qu’il n’arriverait pas à résoudre. Il tombe, un jour, sur un jeune garçon qui jouait devant la case de ses parents. 

– Papa n’est pas là, maman non plus, mais moi je peux te poser des énigmes, dit l’enfant. 

– Pas de problème, répond Nèg Save, mais où est donc ta mère ? 

– Maman est allée chercher ce qu’elle n’a pas semé. 

– Et ton père ? 

– Il est allé ouvrir un trou pour en boucher un autre, mais le trou reste béant. 

– As-tu un frère et où est-il ? 

– Mon père a envoyé mon frère à la chasse en lui recommandant d’abandonner tout le gibier qu’il trouvera ; tout ce qu’il ne trouvera pas, il le rapportera.

Nèg Sav n’en croyait pas ses oreilles et il en avait le bec cloué. Il remet les trois sacs d’argent à l’enfant qui, après les avoir mis à l’abri, lui propose de lui donner les réponses qu’il n’a pas su trouver. 

– Tu m’as demandé où était ma mère ? Elle est allée chercher ce qu’elle n’avait pas semé. Maman est une matrone qui aide les mères à mettre leur petit au monde mais qui n’est jamais présente lorsqu’elles les conçoivent. 

– Et ton père ? 

– Papa est allé ouvrir un trou pour en boucher un autre, mais le trou reste béant. Il a été emprunté des sous pour rembourser quelqu’un mais, en vérité, il est toujours endetté. 

– Ça c’est bien vrai. Dis-moi, ton frère ? 

– Mon frère avait beaucoup d’insectes parasites aux pieds. Alors papa l’a envoyé à la rivière pour s’en débarrasser mais il a rapporté toutes celles qu’il n’avait pas vues. Voilà pourquoi je t’ai répondu qu’il avait envoyé mon frère à la chasse en lui recommandant d’abandonner tout le gibier qu’il trouvera ; tout ce qu’il ne trouvera pas, il le rapportera.

– Pour être fort, tu es fort en vérité, trois fois s’exclama Nèg Save en réalisant que l’enfant était peut-être bien, bien, bien plus fort que lui en matière d’énigmes.

Le soir, à leur retour, le père et la mère de l’enfant, en écoutant les exploits du jour et en découvrant les trois sacs d’argent furent convaincus que leur plus grand bonheur n’était pas tant de posséder trois sacs d’argent que d’avoir un fils plein d’esprit. »

Si l’homme au grand savoir avait su élargir son champ de questions, peut-être aurait-il résolu cet énigme. 

Et vous, quels types de questions auriez-vous posé à l’enfant pour déjouer ces énigmes ? Comment élargir votre champ de questionnement ?