La vie vue par les Yaquis


En 1961, un étudiant en anthropologie rencontre un vieil indien Yaqui (Nord du Mexique). Ce dernier va progressivement l’initier à ses mystères. Ce livre (et les suivants) vont connaître un succès étonnant. Est-il réel ou nous interpelle-t-il au plus profond de nous-même ? La question reste entière.    

Ici le vieil indien explique ce qu’est un homme de savoir.

Un homme de savoir est un homme qui, sans hâte et sans hésitations, est allé aussi loin qu’il a pu dans la recherche des secrets de la puissance et du savoir. Pour y parvenir, il doit affronter et vaincre quatre ennemis naturels.

Lorsqu’un homme commence à apprendre, ses objectifs ne sont jamais clairs, son dessein est vague et ses intentions imparfaites. Il commence lentement à apprendre et bientôt ses pensées se heurtent, ce qu’il apprend n’est pas ce qu’il avait imaginé. Il prend peur parce que chaque étape soulève une nouvelle difficulté. S’il cède devant la peur, il ne pourra plus apprendre et espérer devenir un homme de savoir.

Pour aller plus loin, il faut défier sa peur et avancer dans le savoir, pas à pas. La peur reculera et l’homme commencera à se sentir plus sûr de lui, son dessein deviendra délibéré.

La peur chassée, une clarté de l’esprit la remplace. C’est son deuxième ennemi, parce que la clarté peut aveugler. Elle pousse l’homme à ne jamais douter, à pouvoir faite tout ce qu’il veut. S’il est aveuglé, la précipitation remplacera la patience et il ne pourra plus rien apprendre.

Aller plus loin, cela signifie défier la clarté, ne l’utiliser que pour voir et avancer pas à pas patiemment en préparant soigneusement ses pas.  Il attendra ainsi la puissance et le pouvoir. Il fera ce qu’il voudra.

C’est le plus puissant de tous ses ennemis. L’homme commence par prendre des risques calculées, continue en dictant des règles et finit, s’il ne parvient à surmonter cet ennemi, par devenir capricieux et cruel.

Pour continuer son chemin, il doit se dominer à chaque instant et manier avec précaution et fidélité tout ce qu’il a appris.

L’homme arrive alors au terme de voyage à travers le savoir, là où il va rencontrer son dernier ennemi, la vieillesse, le seul qu’il ne pourra vaincre, mais seulement tenir en respect.

On n’éprouve plus de peur, la clarté d’esprit ne provoque plus d’impatience et la puissance est maîtrisée, mais on est aussi pris du désir opiniâtre de se reposer. Si l’on s’y abandonne totalement, son ennemi l’abattra comme un homme âgé.

Si l’homme surmonte sa fatigue et accomplit son destin, on l’appellera homme de savoir, même s’il n’a pu qu’un bref moment repousser son dernier ennemi. Ce moment de clarté, de puissance et de savoir aura suffi.