Quand j’étais superman…

supermanAncien grand sportif de haut niveau (rugby), Raphaël Poulain a raconté dans un livre (éditions Robert Laffont, 2011) sa montée vers la gloire et la chute brutale.

Ce livre est un témoignage puissant pour ceux qui rêvent des lumières de la scène.

Dans ce bref extrait, il parle ici à un jeune dont il est l’idole.

« Le rugby, c‘est pas ce que tu crois. Sois fort, sois grand, sois technique, tactique, physique et tu seras riche et connu… Tu crois que c’est ça la réalité d’un groupe ? il est où l’humain ? il est où le plaisir de jouer avec tes postes ? On fait de toi une machine avant l’âge en te faisant croire qu’il faut toujours être le plus fort ! Tu vas courir après toi-même, après l’argent et tu te rendras compte un peu tard que toutes tes illusions ne sont que du vent.

Tu seras nostalgique, à même pas 30 balais. Et tu seras seul. Voilà ce que m’a appris le rugby. Seul malgré tes postes, ta nana, ta famille. J’étais inconscient de l’implication totale que nécessite une carrière. C’est un boulot, un vrai. Dur et éprouvant, mentalement autant que physiquement. Moi je voulais prouver, maîtriser, assurer à tout le monde que j’étais toujours au top du top.  Ce n’était pas humain. Alors j’assume, maintenant, mais à quel prix ? J’en ai voulu à la terre entière, mais c’est moi le responsable.

C’est ça être responsable : accepter ses faiblesses. Je n’étais pas fait pour ce sport. Une chose est sûre, plutôt que de rêver à être le plus riche et le plus connu, saches que tu n’es rien sans les autres.

Un dernier truc : rêve pas trop ta vie ou tu risques de passer à côté d’elle. A te prendre pour ce que tu ne seras jamais. Les héros n’existent pas, malgré ce que tu vois sur les affiches. »

Un peu plutôt, il repensait au président de son club.

« Je le revois tel un empereur romain dans sa corbeille présidentielle.  Je l’imagine admirant son oeuvre, ses gladiateurs, ses dieux du stade et tout son peuple autour de lui scandant le nom du club. il lève le pouce. Il prend la température de la foule et quand il baisse le pouce…A mort ! A mort, Untel ! A mort, Poulain !

Tous ces types partis dans l’ignorance totale. A l’image d’un employé commercial qui a fait tourner la boite à sa manière et que l’on remercie d’une petite claque sur le derrière.  Ce n’est pas le problème de l’oseille, mais celui de la reconnaissance. Elle est où ? une proposition de reconversion ? un repas d’adieu ? Rien n’est organisé, la page est tournée.

Trop occupés par leur système d’entreprise à faire tourner, ils préparent la saison d’après sans se soucier du passé. Il faut rester dans la lumière médiatique, recruter… Pas le temps de penser à l’humain, il faut renouveler le bétail pour faire venir le peuple. »

Bien sûr, cela se passe dans le sport à haut niveau. Ce n’est pas dans les entreprises que les cadres et leurs patrons réagissent comme cela.

Quoique… Qu’en pensez-vous ?