Influencer par la soumission librement consentie

Nous avons abordé la semaine dernière l’influence avec ou sans manipulation. parlons maintenant de la soumission librement consentie :  à  force de donner envie et de créer une désirabilité sociale les participants finissent par adopter une pratique, souhaitent aller plus loin et finissent par engager un processus d’apprentissage plus formalisé.

Le ressort le plus puissant de la méthode de la« soumission librement consentie »   est que l’individu conserve sa liberté de choisir (je vous recommande le livre de Robert Vincent Joule « Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens » où ils développent les méthodes du pied dans la porte, d’escalade d’engagement, de toucher, de la porte au nez, de l’amorçage ou du pied dans la bouche !

Par exemple, au cours d’une expérience, un chercheur vous demande de faire un petit travail qui consiste à recopier pendant 20 minutes un extrait de l’annuaire téléphonique. Incroyable mais vrai, de multiples expériences ont montré que femmes, hommes ou enfants en arrivent à faire librement, comme dans notre exemple, un travail fastidieux dont ils auraient préféré se dispenser.  Ce n’est donc pas parce que les gens sont « libres » qu’ils se comportent librement. C’est encore plus vrai lorsque la personne qui vous invite à faire librement ce qu’elle attend de vous est votre patron, votre chef ou votre maître !

Doit-on en conclure que cette liberté-là ne sert à rien ? Évidemment, non. Elle sert deux fonctions indispensables au formatage idéologique et à la réalisation des comportements socialement nécessaires.

Ne vous en déplaise, non seulement vous accomplirez cette tâche, mais après l’avoir réalisée, vous la trouverez plaisante et intéressante, comme le pensent les gens placés dans la même situation que vous (condition expérimentale de liberté).

Cet exemple illustre la première fonction du sentiment de liberté. Ce sentiment de liberté nous conduit, en revanche, à rationaliser ces actes qui, bien qu’ayant été réalisés dans un contexte de liberté, n’en sont pas moins des actes de soumission. Cela conduit à trouver bels et bons des comportements aussi divers qu’apprendre à surfer sur Internet, dire bonjour à la dame, arriver avant les autres chez un client potentiel, etc., et à considérer comme critiquables d’autres comportements tels que couper les moustaches du chat, dire ses quatre vérités à son directeur, tricher lors d’un examen, etc.

Dans les recherches comme celles que nous venons d’évoquer, le chercheur en appelle explicitement à la liberté des sujets pour obtenir les effets qu’il attend : soit la modification des idées par le processus de rationalisation (par exemple, trouver intéressant de recopier un annuaire), soit la modification des comportements par le processus d’engagement (par exemple, s’arrêter de fumer). D’ailleurs, nombre de pédagogues ou de managers bien formés, ou naturellement « libéraux », ne manquent pas d’en appeler eux aussi à la liberté de ceux qui sont leurs obligés pour obtenir les mêmes effets.

Selon les auteurs, si ces techniques peuvent être utilisés à mauvais escient, elles peuvent aussi aider à servir des causes nobles et importantes : .aider des chômeurs à trouver un emploi, des citoyens à faire de réelles économies d’énergie, des salariés à mieux se protéger contre les accidents, …. Ceci en toute liberté.