Un robot remplacera-t-il la grand-mère qui tricote ?

Blog semaine 3 le robot qui tricoteDirecteur de recherche au CNRS, Jean-Paul Laumond travaille depuis des années sur la définition des mouvements des robots humanoïdes.

Alors que l’on parle de la fin des emplois, et donc de remplacer le salaire par le revenu partagé, que nous entendons plein de choses sur tout ce que pourrait faire les robots à notre place (et mieux que nous), son propos recadre un peu les choses.

Toutes les machines évoluent dans un milieu fermé. Si elle sort de son milieu, elle tombe en panne. Si vous voulez qu’une machine vous conduise d’un point à un autre, il vous faut une voiture autonome. Mais cette voiture autonome ne vous permet pas d’aller chercher une bouteille dans un réfrigérateur. L’intérêt actuel pour la robotique humanoïde n’est pas tant guidé par le désir d’avoir un robot chez soi que par le fait de considérer qu’une machine universelle puisse réaliser différentes tâches et concurrencer les hommes.

Et il prend deux exemples :

1er exemple : il n’existera jamais de mains artificielles capables de tricoter comme une grand-mère. Concevoir une main avec un doigt qui assure la tension de la laine, et une autre dont les doigts manipulent des aiguilles qui exercent la pression nécessaire pour réaliser un point même simple, comme le point mousse, ça n’existera jamais. Pour une raison très simple : on s’en fiche éperdument.

Bien sûr, on pourrait dépenser des sommes folles et on y parviendrait certainement. Mais quel serait l’intérêt ? Il faut toujours se poser la question de la machine « pour quoi faire ». Les machines à tisser tricotent déjà mieux et plus régulièrement que votre grand-mère. Donc la machine universelle qui concurrence les hommes, je n’y crois pas.

2ème exemple : peut-on imaginer des robots juges, pour une justice qui ne serait plus influencée par l’affect ?

C’est la question de savoir si tout est numérisable. L’auteur cite l’exemple du mythe de Phryné. Dans l’Antiquité, cette magnifique courtisane est amenée à comparaître devant un tribunal. Son avocat, sentant que le procès est perdu, arrache la tenue de Phryné, qui apparaît alors nue devant tout le monde. Elle est acquittée. Pour gagner son procès, l’avocat a su faire preuve de persuasion. Donc d’un point de vue rhétorique, on peut légitimement se demander s’il est possible de numériser des arguments. Mais en aucun cas une machine ne pourra utiliser des arguments de persuasion en complément des arguments logiques du droit.

Dans ce cas, ce n’est plus de la justice. On sait très bien que toute décision dépend d’un état émotionnel. La justice ne se résume pas à une mécanique. Les juges n’ont pas besoin de robots. Ils ont éventuellement besoin d’une intelligence artificielle pour trouver une jurisprudence

Dans son entretien, une note d’inquiétude : le danger réside dans une organisation de la société qui réduirait l’homme à sa numérisation. Il ne faut pas laisser ces technologies se développer au sein de grands groupes industriels qui n’œuvrent pas toujours pour notre bien. Il faut laisser une très large place aux investissements publics dans ces domaines.

Mais aussi une note d’espoir : Les machines vont plutôt arriver dans divers secteurs industriels de petite production pour réaliser des tâches extrêmement simples. Elles viendront en aide aux ouvriers sur les chantiers, aux horlogers ou aux prothésistes dentaires.  Demain, j’ai bon espoir que le robot devienne le nouvel outil de l’artisan.

Et vous, qu’en pensez-vous ?

Source : https://usbeketrica.com/