La curiosité est-elle toujours un vilain défaut ?

Perceval ou le conte du Graal est un roman de Chrétien de Troyes rédigé vers 1180. Il raconte l’histoire de Perceval parti à la quête du Graal (objet mythique de la légende arthurienne, il est assimilé à la coupe utilisée par Jésus lors de la Cène et dans lequel son sang aurait été recueilli).  Dans son livre (L’art français de la guerre, Gallimard, 2011, prix Goncourt 2011) Alexis Jenni interprète une part du roman comme celle d’un homme qui ne voit pas ce qu’on lui montre.

Par le plus grand des hasards, Perceval qui ne comprend rien parvient jusqu’au Roi Pêcheur. Celui-ci pêchait de ses propres mains car il n’était plus rien d’autre qui l’amusât encore. Il pêchait dans une rivière que l’on ne peut franchir à l’aide d’une ligne qu’il appâtait d’un petit poisson brillant, pas plus gros qu’un tout petit vairon. Hors de cette barque avec laquelle il pêchait sur la rivière que l’on ne franchit pas, il ne pouvait marcher. Pour regagner sa chambre, quatre serviteurs alertes et robustes saisissaient les quatre coins de la couverture où il se tenaient assis, et on l’emportait assis. Il ne marchait plus de lui-même car un javelot l’avait blessé entre les deux hanches. Il ne faisait plus que pêcher, et il invitât Perceval en son château que l’on ne voit pas de loin.

Perceval était devenu chevalier sans rien comprendre. Sa mère lui cachait tout de peur qu’il ne s’éloigne. En effet elle avait perdu son mari et deux de ses fils à la guerre. Lui devint chevalier par hasard et sans rien savoir. Il parvint au château que l’on ne voit pas et le Graal lui fut montré sans qu’il le sache. Pendant qu’il parlait au Roi Pêcheur, pendant qu’ils mangeaient ensemble, passèrent devant eux dans le plus grand silence des jeunes gens portant de très beaux objets. L’un, une lance et il sortait de son fer une goutte de sang qui jamais ne sèche ; l’autre, un grand plat qui agréait à qui s’en sert, tant il est large et profond, et dans lequel on sert les viandes précieuses avec leur jus. Ils traversèrent lentement sans rien dire, et Perceval les regardait sans comprendre, et il ne demanda pas à qui ils allaient ainsi servir, qui était celui qu’il ne voyait pas. On lui avait appris à ne pas trop parler. Le moment fut un aboutissement, il ne verrait jamais le Saint Vaisseau de plus près, mais il ne le sut pas, car il n’avait rien demandé.

Et l’auteur de continuer « Je pensais à Perceval le chevalier absurde qui n’est jamais à sa place car il ne comprend rien.  Pour tout autre, le monde est encombré d’objets, mais pour lui il est ouvert car il ne les comprend pas. »

La tête dans le guidon, ne sommes-nous pas parfois des Perceval, qui avançons dans la vie, réussissons des exploits mais ne voyant pas et surtout ne comprenant pas ce qui nous entoure, ce qui nous est montré et les signes qui nous sont adressés ? Osons-nous poser des questions, interroger à voix haute ?

Quelques exemples : l’évolution de vos compétences dans votre job actuel correspond-t-elle à l’évolution du marché ? Votre activité est-elle dans la ligne de l’évolution prévisible de votre entreprise sur le marché ? L’intelligence artificielle commence à faire bouger les choses en termes de pratique des métiers : l’avez-vous intégré dans votre réflexion ?

Les réponses à ces questions viendront de vos questions et partages avec vos collègues, encadrants, clients, fournisseurs, vos lectures, …

Retrouvez un résumé du roman de Perceval en cliquant sur ce lien : vous verrez que l’auteur n’a pas trop dévié.