Sortez du complexe de Prométhée

Tout petit, le feu vous a sûrement fasciné. Mais vos parents veillaient au grain et vous empêchaient de jouer avec les allumettes, que ce soit en vous tapant sur les doigts ou en élevant la voix. Et pourtant, dès que nous avons pu, nous avons voulu tester ce pouvoir. C’est ce que le philosophe Gaston Bachelard (1884-1962) a résumé sous la forme suivante : « nous nous proposons de ranger sous le nom de complexe de Prométhée toutes les tendances qui nous poussent à savoir autant que nos pères, autant que nos maîtres, plus que nos maîtres ». 

Quelle en est l’origine ? 

Il était une fois deux frères, Prométhée (le prévoyant) et Épiméthée (l’étourdi) à qui Zeus avait confié la tâche de répartir toutes sortes de qualités naturelles (vitesse, force, …) entre les êtres vivants sur terre. Épiméthée se dépêcha de distribuer seul toutes ces qualités, parce qu’il en avait assez d’être chaperonné par son frère. Hélas, lorsque Prométhée s’en rendit compte, ils découvrirent que l’Homme n’avait rien reçu et qu’il ne restait plus rien à distribuer. Pour compenser cela, Prométhée déroba le feu et le remit aux Hommes. Or le feu permit à l’Homme de créer des outils, de manger de manière plus variée, de se défendre, de se chauffer, bref de dépasser sa condition et de devenir ainsi presque un dieu. 

Plus largement, le complexe de Prométhée est une métaphore psychologique qui fait référence à la tendance humaine à défier les limites et à rechercher le progrès, souvent au risque de conséquences imprévues. 

Ce complexe n’est pas sans avantages : ce sentiment de vouloir faire plus que son père et ses maîtres, c’est ce qui a encouragé  l’innovation et la découverte, poussant l’humanité vers de nouveaux sommets technologiques et intellectuels. Il symbolise la quête de l’autonomie et de la liberté individuelle, incitant chacun d’entre nous à prendre en main son destin et à façonner son avenir. Pour finir, ce complexe reflète la capacité de l’homme à s’adapter et à surmonter les obstacles, favorisant ainsi la résilience face aux défis.

Mais il a aussi ses risques : sur un plan global, la poursuite incessante du progrès avec des conséquences potentiellement dangereuses ou éthiquement discutables comme le déséquilibre écologique ou encore au niveau individuel, à une course perpétuelle qui déshumanise le travail et les relations interpersonnelles.

Comment y trouver un équilibre de manière constructive ? 

Au niveau individuel, cela passe par de la formation continue pour maintenir ses compétences à jour. C’est le rôle de la transmission au quotidien entre collègues, au travers des tâches à effectuer, … 

Au niveau de l’organisation, c’est s’assurer que la culture d’entreprise valorise l’innovation durable et responsable.

Enfin, au niveau sociétal, il s’agit d’instaurer un dialogue ouvert sur les implications éthiques des innovations.

Notre part de responsabilité n’est pas la même à chaque niveau. Commencez déjà par là où vous avez du champ d’action : transmettre de bonne manière de façon durable et responsable. 

Comment vous y prenez-vous ?