L’incertitude, cela s’apprend-t-il ?

Nous vivons dans un monde qui change, qui va encore changer et nous allons devoir revoir toutes nos certitudes et nos projections. Comment apprendre à vivre dans  l’incertitude ?

Loin, très loin nous, dans le Kamtchatka, aux confins de la Russie, vit une peuplade, les Even, des nomades devenus par la force des choses des sédentaires sous le régime communiste, puis à la chute de celui-ci, ils sont repartis dans la forêt, réapprendre à vivre au contact de la nature, des animaux et des éléments. 

Leur vie est faite d’incertitude et leur quête permanente est de sentir les messages envoyés par les éléments qui les entourent. Ils des histoires d’apparence simples où animaux et humains coexistent. Une très grande particularité de leurs histoires est qu’elles n’ont pas de « fin », je veux dire pas de morale, de leçon, un peu à l’opposé de celles de Jean de La Fontaine. 

Un exemple résumé : « un homme part à la pêche et trouve sur son chemin un renard qui fait semblant d’être mort. Il le prend sur son traineau. Pendant que l’homme continu sa route, le renard mange le poisson et, quand il n’y a plus rien, il disparait. L’homme, à son arrivée chez lui, découvre qu’il n’a plus rien. »

Toutes ces histoires sont racontées aux enfants dès leur plus jeune âge. Il s’agit de leur faire prendre conscience que les êtres qui nous entourent sont doués d’attention et d’intentions et qu’ils peuvent à tout moment chambouler notre monde. Cette proximité instable les oblige constamment à développer des capacités pour se mouvoir dans un environnement incertain et aléatoire. . Les enfants doivent trouver des réponses et les partager

Apprendre l’incertitude, c’est sortir des certitudes, de la pensée unique. C’est écouter les opinions opposées et les signaux faibles. C’est enfin ne pas attendre que l’on tire des conclusions des faits pour vous, mais se donner le droit d’avoir un avis personnel plus nuancé. 

Dans un monde où les médias et les leaders de tous types nous « vendent » des certitudes qui changent au fil du vent, apprenons à développer notre jugement. Pas si simple dans un monde où on nous sort la morale avant de nous donner le contexte. 

Un exemple ? Un ami m’a envoyé tout un travail qu’il fait depuis des années sur l’impact du CO2  sur le climat. Il ressort de son travail que nous manquons de CO2 dans l’atmosphère. Est-il à contre-courant de la tendance actuelle où les experts nous disent qu’il y a trop de CO2. Le paradoxe est qu’il y a trente ans, les experts médiatiques estimaient qu’il n’y en avait pas assez. Aujourd’hui c’est l’inverse. Et demain ? Retournement de tendances ? 

Regardez la voiture électrique. Il y a trois ans, c’était le futur absolu. Aujourd’hui, les constructeurs estiment que cela ne dépassera pas 30% du marché (100% électrique). Alors, vous achetez quoi ?  A chacun d’entre nous d’apprendre ou de réapprendre à se forger une opinion. C’est cela, vivre dans l’incertitude : faire des choix en permanence.

Et vous, quelles leçons tirez-vous de l’histoire du renard ? Et ceux qui vous entourent en ont-ils perçu la même finalité ? 

Inspiré du livre de Nastassja Martin, A l’est des rêves, La découverte, 2022