Estimez-vous votre travail utile ou c… ?

David Gaeber, anthropologue américain et anarchiste (c’est lui qui le dit) a jeté un pavé dans la mare le 17 août dernier, si l’on en juge les retombées de son article publié dans Strike magazine). Au-delà de l’effet d’annonce, il soulève quelques bonnes questions.

Que dit Graeber ? (voir l’article original sur http://www.strikemag.org/bullshit-jobs/)  Il critique vertement les métiers de service (RH,  conseil, relations publics, administratif et…manager …) qui ne servent à  rien si ce n’est à occuper des gens qui vont polluer le travail des autres : les productifs !

Bien plus, ceux qui font ces travaux inutiles n’en voient pas le sens eux-mêmes et déversent leur sinistrose sur les autres. Quels sont les travaux utiles ou non ? En bon anarchiste, David Graeber soulève la question, mais ne s’aventure pas à donner la clé (à vous d’apprécier si votre job est utile ou non).

Pour ma part, cela soulève quatre commentaires :

  • D’abord, cela dépend du sens que l’on donne à son boulot. Vous connaissez sûrement cette histoire : « Pierre Lulle, passant devant un chantier, demande à un ouvrier qui taille des pierres : « Que fais-tu ? » : « Je taille des pierres. », lui répond cet homme. Il pose la question à un deuxième ouvrier qui lui répond : «Je gagne ma vie… ». Enfin, le troisième, à qui il fait la même demande affirme, resplendissant : « Je construis une cathédrale ! » …(Selon le propre récit de Raymond Lulle, philosophe, alchimiste, poète, mystique et missionnaire majorquin du XIIIème siècle.) Tout travail a un sens et celui-ci lui est donné par celui qui l’exerce.
  • Deuxièmement, vous pouvez estimer votre travail utile, mais pollué par des tâches à la c…, parce qu’elles n’ont pas d’intérêt pour vous et vous décentrent de votre vrai métier (ce qui ne veut pas dire que ces tâches n’ont pas un intérêt pour quelqu’un d’autre).
  • Il y a aussi une double  injonction paradoxale : par exemple nous voulons plus de sécurité dans notre travail (sécurité de l’emploi, sécurité dans les conditions de travail, …), ce qui signifie plus de règles, de contrôle  (et donc des personnes dédiées) et en même temps, nous voulons être libres, voire autonome.
  • Enfin, les nouvelles formes d’organisation (mode projet,  …) et les outils électroniques (qui permettent des relations directes) limitent l’importance des fonctions supports qui progressivement disparaissent. Où est la limite ? Ainsi, dès qu’un groupe dépasse 6/7 personnes, il y a utilité d’un coordinateur.   Autre exemple : la suppression ou la diminution des contrôleurs dans les trains (pardon : « des agents commerciaux »)  seraient-elles vécues par les voyageurs comme un bien ou un risque ? Les Français deviendraient-ils civiques dès ce moment ?

Pas simple ! Et vous qu’en pensez-vous ?